En novembre 2017, Philippe R. réserve sur le site Booking.com un appartement à Londres, où il passera quatre jours en famille à Noël, moyennant la somme de 1650 euros. Cet appartement, avec vue sur la Tamise, est situé 343 Flag Staff House, 21, Saint George Wharf.
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Lorsque Philippe et sa famille arrivent, le mardi 26 décembre 2017, ils constatent que plusieurs choses ne vont pas : l’éclairage est défaillant (2 spots sur 5 seulement fonctionnent dans la salle de bains, un sur 5 seulement dans la chambre, et il n’y a pas de lampes de chevet).
Eu outre, le matelas du lit-canapé est très sale, la cuisine pratiquement pas équipée ( pas de plats, pas de produit pour le lave-vaisselle, pas de torchons, le four et les casseroles sont sales); il n’y a pas de savon pour se laver, contrairement à ce qui est indiqué sur les photos, pas de sièges au bar, une chaise est défoncée, il manque un sofa; les rideaux du séjour et de la chambre sont bloqués, il n’y a pas de patères pour accrocher les manteaux, il n’est pas possible d’accéder à la terrasse, dont la porte-fenêtre est bloquée, la connexion WiFi est mauvaise.
Ils le signalent aussitôt au service client de Booking.com, qui promet de contacter la société WheretoSleep limited, dépositaire de l’annonce et gestionnaire de l’appartement, afin qu’elle envoie quelqu’un dès le lendemain matin; en fait, c’est seulement vers 17 heures le 27 décembre qu’un représentant de Wheretosleep dépose des ampoules, des lampes de chevet et un deuxième sofa, « déchiré« . Rien n’est fait concernant les autres défauts de l’appartement. Les R. constateront aussi que le ménage n’est pas fait quotidiennement, contrairement à ce qui était indiqué.
A leur retour en France, ils laissent un commentaire négatif sur le site Booking.com : « A éviter absolument, non conforme aux photos », et décernent à la location la note de 3,3 sur 10 (7 janvier 2018). Ils constatent que d’autres visiteurs font de même: « Convenient and reasonable value – but uncomfortable and don’t try to use the wifi !!! 5,8/10 » (non daté); « Vraiment pas conforme aux photos, seul point positif la situation par rapport aux excursions, 3,8/10″ (1er janvier 2018); « Assez médiocre 3,3/10 » (18 janvier 2018).
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25 euros de dédommagement
Ils demandent ensuite à Booking.com de leur rembourser 70% du montant de leur réservation. Le service client leur offre seulement 25 euros. Dans sa réponse, envoyée le 22 janvier, il observe pourtant que « les commentaires clients [..] indiquent que des améliorations sont effectivement nécessaires, et [que] plusieurs d’entre eux révèlent l’existence de problèmes tels que la Wifi ne fonctionnant pas, des problèmes d’humidité ou des objets manquants« . Il constate que « 14 autres voyageurs ont déjà donné un avis sur l’établissement Where to sleep Thames view Apartments, et lui ont attribué une note de 6,5″. Or, écrit-il, « Si vous attendez un certain standard des hébergements que vous réservez, nous vous conseillons d’opter pour ceux qui possèdent une note supérieure ou égale à 7« .
Mécontent, Philippe R. demande au Centre européen de la consommation (CEC)s’il peut intervenir, de manière amiable. Celui-ci reçoit beaucoup de plaintes de voyageurs qui constatent que leur location n’était pas conforme à l’annonce trouvée sur Booking.
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Responsabilité allégée
Or, indique le CEC, Booking.com n’a qu’une responsabilité allégée, au sens de l’article de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique. puisqu’il n’est que le support technique d’offres commerciales conçues, rédigées et proposées par d’autres [en l’occurrence Wheretosleep]. Sa responsabilité civile ou pénale ne peut être engagée qu’à la double condition que le caractère illicite des informations lui ait été notifié et qu’il n’ait pas agi promptement pour retirer ces données ou en rendre l’accès impossible (article 6).
La loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique (article 49) a créé dans le code de la consommation un article L 111-7 , qui impose à l’opérateur de plateforme en ligne de délivrer au consommateur une information loyale, claire et transparente. Un décret du 29 septembre 2017, entré en vigueur le 1er janvier 2018, précise ses obligations. Mais ces textes ne créent pas de responsabilité de la plateforme sur le contenu posté par le vendeur.
Conditions pour agir
Le Centre européen de la consommation indique que Booking ne peut voir sa responsabilité engagée que si le consommateur apporte les preuves de ce que la plateforme était au courant des défauts de l’annonce, et qu’elle n’a pas agi pour retirer ou corriger l’annonce à la suite de cette information. « Si les critiques concernent la non-délivrance d’un service promis tel que climatisation, télévision, meubles (manquants), et que Booking n’a pas modifié l’annonce après le dépôt des commentaires, alors la responsabilité de Booking peut être engagée« , indique Bianca Schulz, la responsable du centre, en précisant que « ces conditions sont cumulatives ».
Pour que le Centre puisse intervenir, Philippe R. doit lui fournir : – l’annonce initiale ; – la confirmation de sa réservation; – les échanges écrits avec Booking; – les photos qu’il a prises dans le logement ou toute autre preuve; – les commentaires postés et leur date de dépôt.
Il sera sans doute plus facile pour le Centre d’intervenir auprès de la société Wheretosleep, afin qu’elle fasse un geste commercial. Il doit pour cela disposer de l’annonce initiale avec les photos de présentation et les services à disposition (WiFi, climatisation, balcon, piscine…), et des photos prises sur place.